The Stockwell Letters (encore non traduit en français) est un roman historique très intéressant qui aborde le rôle des femmes dans le mouvement abolitionniste. Au milieu du XIXe siècle, les États-Unis sont divisés entre le Nord, qui a aboli l’esclavage, et le Sud, où l’esclavage est non seulement légal, mais continue de constituer l’épine dorsale de l’économie des plantations et de la société. Déterminés à mettre fin à l’esclavage partout dans le pays, les abolitionnistes font activement campagne auprès du gouvernement fédéral pour qu’il réforme la loi et traite tous les êtres humains comme égaux et libres.
Parmi les trois personnages principaux du roman figure Ann Philips, une militante de Boston engagée pour la cause de la liberté aux côtés de son mari Wendell Phillips. Véritable personnage historique, Ann a souffert toute sa vie d’une condition physique fragile. Cela ne l’a pas empêchée de jouer un rôle clé dans l’ombre en rédigeant les discours de son mari et en coordonnant activement le réseau des relations abolitionnistes à travers le pays. The Stockwell Letters montre comment elle s’est impliquée dans la défense d’Anthony Burns, un esclave devenu célèbre pour s’être enfui au Nord avant d’être renvoyé dans le Sud, racheté, puis libéré.
Les chapitres alternent entre l’histoire d’Ann, le parcours tortueux d’Anthony de l’esclavage à la liberté, et l’histoire de Colette, l’épouse du propriétaire d’une plantation de tabac en Virginie. Ce dernier personnage est fictif, mais l’autrice explique, dans sa postface, que Colette a été inspirée par une mystérieuse femme donatrice anonyme qui a financé les études d’Anthony pendant qu’il était dans le Nord.
J’ai trouvé The Stockwell Letters extrêmement intéressant et captivant. J’ai même pleuré à la lecture de scènes particulièrement violentes montrant l’extrême cruauté du traitement des esclaves, en particulier les fugitifs.
J’ai aimé…
- l’alternance des points de vue. Alors que les récits d’Ann et de Colette sont narrés à la première personne, celle d’Anthony l’est à la troisième personne, ce qui reflète son aliénation et son impuissance alors que son cas devient un symbole de la lutte entre les abolitionnistes du Nord et les Sudistes pro-esclavagistes. Pourtant, l’identification est forte avec les trois personnages et j’ai trouvé que l’autrice avait réussi à créer une voix unique et attachante pour chacun d’entre eux.
- la perspective féminine dans le roman. Comme Ann et Colette, le lecteur prend connaissance des principaux développements de l’affaire Anthony Burns de manière indirecte, par le biais des rapports oraux des hommes impliqués (comme Wendell) ou de la presse. Sans être fastidieux, ce mode de narration reflète le rôle limité des femmes dans la sphère publique au XIXe siècle, tout en montrant que ces restrictions ne les empêchaient nullement de s’engager dans la défense de leurs idées.
- apprendre plein de choses sur l’histoire de l’esclavage et du mouvement abolitionniste aux Etats-Unis, y compris les aspects juridiques et organisationnels du cas Anthony Burns. J’ai découvert le rôle des comités de vigilance ainsi que les dispositions honteuses du Fugitive Slave Act obligeant les Etats du Nord à renvoyer les esclaves évadés dans leur Etat d’origine, privant ces hommes et femmes de leur liberté durement gagnée et les soumettant à la menace de tortures voire de la mort en représailles à leur évasion.
- la postface de l’autrice, qui aide à démêler les faits de la fiction.
J’ai moins aimé…
- deux scènes qui m’ont paru peu crédibles. La réaction de Colette lorsque son mari fait une attaque et la décision d’Anthony de monter sur le pont du bateau lors de son voyage avec McDaniel – alors qu’il sait que sa liberté ne tient qu’à un fil – m’ont semblé incohérentes par rapport à leur psychologie dans le reste du roman.
- les erreurs dans les expressions françaises utilisées par Colette dans certaines parties de son récit.
Merci à NetGalley et aux éditions SparkPress de m’avoir permis de lire ce livre peu de temps avant sa publication officielle le 29 août 2023.