Traduit de l’anglais, Stupeur est un roman historique pour jeunes adultes dont l’intrigue se déroule à New York en 1906. La jeune héroïne, Prudence, d’origine modeste, rêve de devenir médecin. Quand l’opportunité d’assister un épidémiologiste de renom au sein du département de l’Hygiène et de la Santé se présente, Prudence la saisit sans hésiter. Face à une épidémie de fièvre typhoïde inexpliquée, elle se trouve mêlée à une enquête fascinante mais aussi troublante, la forçant à reconsidérer certains de ses principes.
Une épidémie qui suscite une vocation
Parce qu’elle a perdu un frère et un père, Prudence est obsédée par la mort ou, plus précisément, par les moyens de la combattre. À l’école pour jeunes filles de bonne famille à laquelle l’a inscrite sa mère, elle s’ennuie ferme et se sent différente. À 16 ans seulement, elle cherche un travail pour aider sa mère à subvenir à leurs besoins, et voit un rêve se réaliser. Fascinée par l’anatomie et les sciences de la vie, elle obtient un poste d’assistante auprès du docteur George Soper. C’est l’occasion pour elle de participer à une enquête très médiatisée visant à trouver Mary Mallon, une cuisinière suspectée de contaminer tous ses clients de la fièvre typhoïde, alors qu’elle-même n’est pas malade. En 1906, la théorie qu’un être humain pour transmettre un virus sans en avoir lui-même les symptômes n’est pas encore prouvée. Ce qui va rendre la tâche particulièrement difficile à Prudence et son mentor…
Le journal intime d’une jeune femme passionnée
Écrit dans un style très fluide à la manière d’un journal intime, Stupeur séduit avant tout par son héroïne attachante et son sujet original. Sensibilisée aux questions médicales par sa mère qui est sage-femme, Prudence est largement autodidacte et inclus dans son journal des croquis reflétant ses apprentissages. Les illustrations en noir et blanc de Jean-Marc Superville Sovak et Louis Diallo, sans être remarquables, permettent d’aérer la lecture et de créer une impression d’authenticité.
Une histoire aux résonances contemporaines
Si la magnifique couverture du livre, dessinée par Noëmie Chevalier, fait penser à un roman noir ou de fantasy, Stupeur est bel et bien un roman historique doublé d’une enquête médicale à la limite du genre policier. Sans assommer le lecteur de termes médicaux ou de faits historiques étrangers à l’intrigue, l’autrice parvient à susciter, à travers son histoire, de nombreux questionnements très intéressants autour des thèmes de la science et de l’éthique (« peut-on traiter un individu contre son gré ? »), du rôle de la presse dans la diffusion de fausses informations (avec des titres sensationnalistes comme « Mary Typhoïde » en une des journaux), ou encore des relations hommes-femmes (la médecine étant alors un domaine encore très largement réservé aux hommes).
Si l’on excepte quelques aléas de traduction dans la concordance des temps avec une utilisation parfois déroutante de l’imparfait et du plus-que-parfait pour relater la journée écoulée, Stupeur est un excellent roman à recommander à tous les ados passionné-e-s par les sciences de la vie et/ou l’histoire.
Article original publié dans Le Suricate magazine.