Dans son roman historique Monstres, Frédéric Richaud évoque le destin singulier d’une « apothicaire » entrée au service de la reine Anne d’Autriche et du jeune Louis XIV. Née avec des difformités , Catherine Beauvais, surnommée « Cateau », est rejetée par les siens comme par les membres de la Cour. Afin de se faire une place dans ce monde superficiel et guindé, elle développe sa connaissance des plantes pour soulager les maux intestinaux de la Reine et de son entourage.
Le règne des apparences
Née dans une famille modeste et rejetée par ses parents, Catherine est élevée par sa grand-mère. Celle-ci lui transmet sa connaissance des clystères, ces lavements prisés au XVIIe siècle pour traiter les problèmes digestifs et autres désagréments « du derrière ». Mariée à un vendeur de rubans, elle aspire à une autre destinée. En 1655, sa vie change du tout au tout quand elle obtient une place au Palais du Louvre à Paris. Elle est engagée pour soigner les ballonnements de la reine mère, Anne d’Autriche. Son arrivée par la petite porte la met toutefois à rude épreuve. Constamment humiliée par les courtisans qui se moquent de sa laideur, elle est consciente de la précarité de sa situation. Un concours de circonstances lui fera ensuite rencontrer Mazarin, mademoiselle de Scudéry, et même le jeune roi Louis XIV.
Une héroïne atypique
Si le lecteur ne peut pas s’empêcher de ressentir une certaine empathie vis-à-vis de Catherine, son personnage est loin d’être une victime ingénue. Poussée par un désir de revanche, elle utilise sa connaissance des plantes pour manipuler autant que pour guérir. En décrivant son rôle subalterne dans les alcôves du pouvoir, Monstres dénonce le manque d’hygiène, l’hypocrisie, la cruauté et le caractère superficiel de la Cour.
J’ai surtout aimé…
le style de l’auteur. Le roman ne fait que 200 pages et se lit vite, mais il est riche en péripéties. L’intrigue est bien construite et assez peu prévisible. Bien que le point de vue principal soit celui de Catherine, un narrateur omniscient intervient à certains moments du récit (principalement au début et à la fin du roman) pour faire prendre de la distance au lecteur. Ce procédé fait du roman une sorte de fable sur « la relativité du laid et du mensonge des apparences » (les mots de conclusion).
J’ai moins aimé…
le revirement un peu soudain et peu crédible du « sérail » de mademoiselle de Scudéry à la fin du roman.
J’aurais aimé…
un peu plus de contexte historique dans les passages consacrés à l’évocation de la Fronde et de la rivalité entre Mazarin et le cardinal de Retz.
Merci à NetGalley et aux éditions Julliard de m’avoir permis de découvrir ce livre au moment de sa publication officielle le 6 octobre 2022.
Image en tête d'article : Anne d'Autriche, régente, Louis XIV et Philippe de France, duc d'Anjou, vers 1645 (détail). © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot.