Louise et Hetseni – Dans les plaines sauvages est un roman à double ligne du temps (une tendance décidemment omniprésente dans la fiction historique ces dernières années !), accessible aux enfants dès 9 ans, qui nous plonge dans l’Amérique de 1851, en pleine Conquête de l’Ouest alors que des groupes de colons traversent les Grandes Plaines à la recherche de terres fertiles et de minerai dans l’Eldorado californien.
Jonas est un garçon de onze ans qui quitte le Missouri avec son père et un groupe de pionniers pour aller chercher fortune en Californie. « Poltron », comme il se décrit lui-même, il souffre des conditions difficiles du voyage et craint d’être scalpé par un Indien, au grand désespoir de son père qui voudrait que son fils soit aussi intrépide que lui. Un évènement inattendu va cependant chambouler la donne en mettant Jonas et son ami Zacharie en contact avec des tribus cheyennes… changeant à jamais leur perception de la vie dans les Grandes Plaines, mais aussi leur charactère d’hommes en devenir.
Louise est quant à elle une collégienne de douze ans qui habite à Paris et dont le père écrivain est en train de créer l’histoire… de Jonas ! À travers le temps et l’espace, les deux préadolescents vont miraculeusement parvenir à communiquer, faisant découvrir à Louise l’histoire fascinante de la Conquête de l’Ouest.
Malgré cet élément fantastique, le récit de la traversée du Etats-Unis est très réaliste et offre une description intéressante des conditions de vie des colons comme des tribus indiennes dans l’Amérique du milieu du XIXe siècle. Peureux mais lucide et désireux de ne pas décevoir son père, Jonas est un personnage tout de suite attachant dont la transformation progressive révèle un courage insoupçonné…
Les interventions de Louise, qui découvre les aventures de Jonas au fur et à mesure de l’écriture du livre, ont avant tout une vertu pédagogique, permettant d’expliquer certains éléments du contexte historique (elle se documente sur cette période et fait part à Jonas – et au lecteur – de ses découvertes). Mais elles créént aussi des possibilités intéressantes du point de vue de la narration, donnant naissance à un dialogue singulier entre deux personnages et deux époques, avec pour résultat une amitié improbable qui les influencera l’un comme l’autre.
Si le récit parallèle de Louise interrompt parfois un peu abruptement le flot du récit principal (le personnage de Mathias Stelman n’apporte par exemple pas une grande valeur ajoutée), la structure fonctionne globalement bien et permet à l’auteure de suggérer des pistes de réflexion intéressante sur l’histoire (principalement le sort réservé aux Indiens d’Amérique), l’éducation (à travers l’évolution de la relation entre Jonas et son père), l’écriture, et la liberté d’action des individus. Ainsi Jonas se pose-t-il la question :
[J]e pense à mes échanges avec Louise. Je suis troublé par ses paroles. Je serais juste un personnage d’histoire, sans existence propre ?
Avant de conclure :
Je crois en moi désormais et je veux choisir le chemin que je vais emprunter.
Une belle histoire d’apprentissage de la liberté – que même les adultes pourront apprécier.
J’ai aimé…
- La description des conditions de vie des colons et surtout des tribus cheyennes
- La façon subtile dont les personnages se transforment au contact des autres
- L’inclusion de références historiques (comme par exemple l’évocation de l’expédition Donner de 1840) bien intégrées à l’intrigue
J’ai moins aimé…
- La façon dont les interventions de Louise casse parfois le rythme du récit principal
- Le personnage de Mathias, qui n‘apporte pas grand-chose au roman
Merci à NetGalley et à Rageot éditeur de m’avoir permis de lire ce livre au moment de sa publication officielle le 9 mai 2018.