Jean-Marie Pen est un artiste-peintre et écrivain autodidacte. Né en 1959, il commence à peindre en 1994. Ses toiles représentent des paysages, des natures mortes mais aussi des portraits. Avide de lectures et en particulier d’histoires fantastiques, il a publié plusieurs romans policiers et thrillers. Son dernier roman, Du sang dans les buttereaux, est paru en mars 2017 aux Éditions Ex Aequo.
Jean-Marie Pen nous parle ici de son thriller historico-fantastique, Le 2 d’octobre, paru en février 2016.
Dans le roman, votre personnage principal se retrouve propulsé à différentes époques à des moments historiques clés, comme la bataille d’Harfleur en 1425, la Terreur en 1793, ou encore les tranchées de la Première Guerre mondiale. Pourquoi avoir choisi ces dates en particulier, et pas 1572, 1789 ou 1848 par exemple ?
Ces choix se sont imposés d’eux-mêmes, car j’avais en tête des images bien précises, des atmosphères et ambiances. Je n’ai pas cherché à faire coïncider mes écrits avec ces dates, mais à retrouver quels faits historiques pouvaient servir de toiles de fond à mon histoire, et cette histoire est certainement nourrie des faits historiques qui m’ont toujours intéressé, comme la Terreur ou les tranchées de 14. De plus, je désirais pouvoir bâtir mon histoire avec des personnages ou des situations peu connus au sein même de ces périodes « historiques » comme la Terreur ou la Grande Guerre. Ainsi, le colonel Louis de Grandmaison a réellement existé et est mort au combat en 1915 et le 14 juillet 1943, la région parisienne a subi des bombardements de la part des alliés.
Les époques changent, mais la même scène de « crime » se rejoue sans cesse. Pensez-vous que nous sommes prisonniers de notre passé ?
Je crois que, l’âge venant, on peut briser quelques chaînes de son passé. La compréhension du présent nous instruit sur le passé, même si nous pouvons renouveler des erreurs. Mais nous nous construisons sur ce que nous avons traversé, sur ce dont nous sommes faits, et je ne sais pas si l’on peut complètement se réinventer, changer de vie, être autrui. Ça me paraît improbable de pouvoir le faire à 100 %. Le passé resurgit toujours, tôt ou tard, mais pas forcément de la plus mauvaise manière qui soit. On garde peu ou prou des « tics » ou des « tocs ».
Deux tableaux de Jules Bastien Lepage sont au cœur de l’intrigue. Pourquoi avoir choisi cet artiste ? De manière générale, dans quelle mesure votre activité d’artiste-peintre influence-t-elle votre façon d’écrire ?
Je voulais un peintre beaucoup moins connu que Renoir par exemple, ou même Cabanel, dont Bastien-Lepage fut l’élève, car la vraisemblance de l’intrigue s’en serait trouvée amoindrie si mon héros avait découvert par hasard une toile d’un grand maitre, et ceci sans s’en rendre compte. Bastien-Lepage reste quand même un peintre reconnu et dont les toiles sont exposées dans de grands musées. Il est mort à 36 ans et je me suis toujours demandé quels chefs-d’œuvre les artistes comme lui qui sont morts si jeunes auraient pu réaliser pour, peut-être changer notre vision du monde. Il me plaît à imaginer quelle aurait pu être la carrière de Van Gogh, Jimi Hendrix ou de Boris Vian s’ils avaient vécu plus vieux.
Mon activité de peintre n’influence pas véritablement ma façon d’écrire dans le sens où je n’intègre pas dans mes histoires de réelles expériences autobiographiques, mais seulement des « impressions » et surtout ce qu’on pourrait appeler des fantasmes, comme dans mon livre Sfumato où le héros connaît le succès et une incroyable aventure que bien sûr, j’aurais aimé vivre.
Parmi les romans, films ou séries qui font voyager leurs personnages dans le temps, quel est votre préféré ?
Il y en a beaucoup, mais je crois que mon livre préféré reste Replay de Ken Grimwood où le héros vit et revit maintes fois sa vie en gardant sa conscience de celui qu’il était. On parlait du fait de savoir si on est prisonnier de son passé. Ce livre est un vrai questionnement pour cela. Que changeriez-vous si vous pouviez revenir en arrière ?
Il y a aussi ce manga de Jiro Taniguchi, Quartier Lointain, très beau pour son dessin et fantastique aussi pour son histoire. Également La Brèche de Christophe Lambert, un écrivain dont j’ai acheté le livre en voyant sa couverture, une magnifique illustration de Manchu. Je n’ai pas regretté !
Mon film préféré sur le thème du voyage temporel reste Un jour sans fin que je peux revoir aussi… sans fin. Car là, en plus, il y a l’humour et Bill Murray.