Zola et Alexandrine (photographie non datée, domaine public).

Les Zola : la femme dans l’ombre de l’écrivain

La bande dessinée Les Zola aurait pu s’intituler « Alexandrine Zola ». Cette biographie en images du grand écrivain français Émile Zola (1840-1902) est un effet avant tout un hommage rendu au rôle crucial, et pourtant méconnu, joué par sa femme Alexandrine tout au long de sa carrière littéraire.

De la rue aux salons bourgeois

Couverture de la BD « Les Zola » (Dargaud, août 2019)

Issue d’un milieu très pauvre, Alexandrine est orpheline avant d’avoir atteint l’âge adulte. Elle travaille sans relâche pour sortir de sa condition et devient la muse des peintres Cézanne et Manet sous le pseudonyme de Gabrielle. Femme libre, elle finit par céder aux avances d’un « petit poète italien » désargenté aux grandes ambitions littéraires. Émile Zola est fasciné par la force de caractère de cette jeune femme qui lui fait découvrir la misère sociale des bas-fonds parisiens. Ce décor servira de toile de fond à plusieurs de ses romans les plus célèbres comme Nana, Germinal ou l’Assommoir.

Malgré la résistance de sa mère, Zola finit par épouser Alexandrine, dont les origines modestes sont parfois source de railleries dans les milieux littéraires. Malgré les épreuves que traversent le couple (l’impossibilité pour Alexandrine d’avoir un enfant, l’infidélité de Zola, la condamnation et l’exil suite à l’affaire Dreyfus…), Alexandrine reste un soutien indéfectible. Après la mort de son mari, elle va même jusqu’à se battre pour que les enfants de son mari et de sa maîtresse puissent porter le nom de leur père.

La vie de l’écrivain en coulisses

La jeune dessinatrice Alice Chemama, dont Les Zola est le premier album, évoque sous des traits faussement naïfs le Paris haussmannien dans lequel les taudis ouvriers côtoient les grandes maisons bourgeoises. L’utilisation d’une large palette de couleurs et la technique d’aquarelle contribuent à renforcer l’émotion ressentie à plusieurs moments clés du récit, même si les personnages n’ont pas un visage forcément très expressif.

Le récit est par ailleurs informatif. Il évoque sans pédagogisme excessif la façon dont l’œuvre de Zola s’inscrit dans le contexte littéraire, économique, social et politique de l’époque. En tant que représentant du courant réaliste, Zola adopte une approche presque « documentaire » dans ces romans. Il se voit même accusé de « pornographie », ce qui n’empêche pas la série des Rougon-Macquart d’être un grand succès en librairie.

On regrette toutefois que le contenu de plusieurs controverses artistiques et politiques dans lesquelles Zola a été fortement impliqué ne soient pas un peu plus approfondies. Les fameuses soirées de Médan, ou encore la brouille entre Zola et Cézanne, sont ainsi surtout évoquées du point de vue de leur impact sur la vie privée des Zola. Pour en savoir plus sur le fond des débats, il faut se référer à d’autres ouvrages – dont certains sont utilement référencés à la fin de la bande dessinée.

Vidéo Bonus : La dessinatrice

Article original écrit pour Le Suricate Magazine.

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