Statue d'une nonne catholique

Benedetta, un biopic outrancier qui laisse perplexe

Benedetta, le dernier film de Paul Verhoeven, avait déjà beaucoup fait parler de lui avant même sa sortie. Inspiré du livre Immodest Acts (1986) de l’historienne Judith C. Brown, il retrace la vie de Benedetta Carlini, une jeune nonne catholique du XVIIe siècle dont les supposées visions du Christ et la relation lesbienne avec une autre nonne ont fait scandale. Un sujet sulfureux qui aurait pu donner lieu à une drame historique passionnant, mais dont les exagérations et les mauvais dialogues en font plutôt un film parodique.

Sainte ou diablesse

Au début du XVIIe siècle, la Contre-réforme catholique bat son plein en Italie. Alors que Florence est menacée par une épidémie de peste, ses habitants espèrent un miracle tout en cherchant des bouc-émissaires. À quelques kilomètres de là, le couvent des Théatines à Pescia semble préservé. Il héberge une jeune nonne, Benedetta, qui prétend avoir des visions du Christ. Au fur et à mesures des petits « miracles » qui accompagnent ses révélations, elle parvient à convaincre la hiérarchie du couvent que Dieu s’exprime à travers elle. Mais certains crient au subterfuge et Benedetta, plutôt que de devenir une sainte, risque de finir sur le bûcher…

Un mélange de registres qui fait flop

Malheureusement, le personnage principal, interprété par Virginie Efira, manque franchement de profondeur. Outre le fait que la blondeur de la Benedetta adulte contraste avec le noir profond de la chevelure du personnage enfant, à une époque où on imagine mal les nonnes se décolorer les cheveux (!), les scènes de visions mystiques et les scènes censées être sensuelles sont tellement kitsch (avec, on imagine, des clins d’œil délibérés au séries B et aux films érotiques des années 1970) qu’il est difficile pour le spectateur de ressentir un sentiment autre que l’amusement ou l’irritation.

Si les péripéties de l’intrigue auraient pu donner lieu à une forte tension dramatique sur fond de sexe, de sacré et de luttes d’influence, il n’en est rien. Dès les premières minutes, les dialogues comme le jeu des acteurs sont tellement outranciers qu’on se prend à rire à presque chaque réplique, sans que l’intention du réalisateur semble avoir été de réaliser une comédie. Les va-et-vient entre le registre dramatique et comique ne fonctionnent tout simplement pas.

Une occasion ratée

Le résultat est d’autant plus décevant que les costumes et les décors sont magnifiques, et que le scénario aborde des thèmes très intéressants comme le rôle des femmes dans la religion, les « faux prophètes », la relation au corps dans le mysticisme… La seule actrice qui sort son épingle du jeu est Charlotte Rampling, dans le rôle de la mère supérieure. Son personnage, plus subtil et mystérieux, donne une petite touche féministe au dénouement. Dans un univers où seuls les hommes peuvent répandre la parole de Dieu par le prêche, les « visions » d’une Jeanne d’Arc ou d’une Benedetta ne sont-elles pas le seul moyen pour les femmes d’obtenir reconnaissance et influence ?

On aurait aimé que le film explore davantage cette question. On attendait mieux du réalisateur de Basic Instinct.

Article original écrit pour Le Suricate Magazine.

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