Au péril de la mer est un roman historique relativement court (208 pages) qui nous transporte au cœur du Mont Saint-Michel tel qu’il était au XVe siècle. Alors que Gutenberg vient d’inventer l’imprimerie, les moines de l’abbaye de Saint-Michel recopient encore avec application des manuscrits précieux décorés d’enluminures, conservés dans leur bibliothèque alors réputée comme l’une des plus riches d’Europe.
L’originalité du roman de Dominique Fortier est de nous faire découvrir la vie quotidienne au Mont Saint-Michel à travers les yeux d’un homme non-religieux, arrivé à l’abbaye un peu par hasard. Éloi Leroux est un peintre-portraitiste entré en dépression après la mort de sa maîtresse. Désœuvré, il est recueilli par son cousin Robert, un religieux en charge de la gestion quotidienne de l’abbaye. Il y découvre la vie des moines et leurs rituels, de la liturgie au travail des copistes, en passant par l’entretien du potager et jardin médicinal.
Petit à petit, il prend le chemin de la guérison en apprivoisant ce lieu unique car construit sur un site exceptionnel, entre mer et terre, « au péril de la mer » :
Quel que soit l’angle sous lequel on le regarde, il est impossible de voir précisément où s’arrête le roc et où commence l’église.
Outre le récit principal, le roman comprend une deuxième ligne du temps parallèle : celle de la narratrice-autrice. Jeune mère habitant en Amérique du Nord, celle-ci partage sa fascination, depuis l’enfance, pour le Mont Saint-Michel, et la façon dont son processus d’écriture s’est adapté suite à la naissance de sa fille.
Si cette deuxième voix – qui reste secondaire – permet d’introduire des informations intéressantes sur l’histoire du Mont Saint-Michel avant et après le XVe siècle, j’avoue avoir eu un peu de mal à m’attacher à ce deuxième récit. Transitions pas toujours claires, digressions étymologiques… Malgré cela, Au péril de la mer reste un roman très agréable à lire. Une mise en appétit idéale avant d’aller visiter la fameuse « Bastille des mers » de Normandie.
J’ai aimé…
- Les personnages d’Eloi et des moines de l’abbaye. Robert et le frère Clément, en particulier, sont des personnages attachants : à la fois humbles et curieux, mystérieux et authentiques.
- Les informations historiques sur le Mont Saint-Michel, distillées de manière assez naturelle par la narratrice au fil du récit. Ces remarques permettent notamment de faire le lien entre l’abbaye telle qu’est décrite au XVe siècle et le monument tel qu’il existe aujourd’hui.
- La réflexion en filigrane sur le rôle de la lecture et l’écriture dans la vie d’un artiste peintre analphabète. Une façon de rappeler la place de l’écrit dans la Renaissance.
J’ai moins aimé…
- La voix de la narratrice-autrice, à laquelle je ne suis pas parvenue à m’attacher, et ses digressions étymologiques.
Merci à NetGalley et aux éditions Les Escales de m’avoir permis de lire ce livre au moment de sa publication officielle en mai 2019.