Journaliste et avocat, Alain Berenboom est un auteur belge prolifique, créateur du personnage de Michel Van Loo, un détective privé bruxellois qui mène ses enquêtes dans la Belgique et le Congo de l’après-Seconde guerre mondiale. Expo 58, l’espion perd la boule constitue le dernier tome en date des aventures de ce détective raté. Sorti en mars 2018 chez Genèse Edition, le roman explore les coulisses de l’Expo 58, cette grande exposition universelle célébrant le progrès technique et la paix entre les peuples. Organisée à Bruxelles dans un contexte de guerre froide propice aux histoires d’espionnage, l’Expo 58 a déjà donné lieu à plusieurs romans et bandes dessinées à succès comme le roman de Jonathan Coe, traitant lui aussi de l’évènement sur un mode humoristique.
Dans le roman de Berenboom, Van Loo est recruté par le ministère de l’Intérieur pour enquêter sur l’infiltration d’une taupe au sein de la Commission hydraulique chargée de superviser le réseau de distribution d’eau entre les différents pavillons de l’Expo. Très vite démasqué par le Président de la Commission et sa fille, Van Loo découvre un univers tendu où les nombreux ouvriers kurdes et arabes du chantier font l’objet de menaces dont l’origine n’a peut-être finalement rien à voir avec les tensions entre les géants soviétique et américain…
Plus que l’intrigue policière, c’est bien le style de l’auteur, plein d’humour et de références au folklore bruxellois, qui donne tout son charme au roman. Amateur de gueuze grenadine et de belles femmes (qu’il se met à détester dès qu’elles ne cèdent pas à son charme et lui révèlent ses propres limites), Van Loo est l’archétype du « bon belge » : bon vivant, roi de la débrouille, méfiant des institutions, pragmatique plus qu’idéaliste et prompt à l’auto-dérision. Malgré le ton léger, plusieurs thèmes importants apparaissent en filigrane, révélant de fortes tensions sociales (entre communistes et « capitalistes »), raciales (notamment au sein des communautés immigrées, les ouvriers italiens se méfiant des « Arabes » et les arabes se méfiant des kurdes…), et diplomatiques.
Au final, la lecture d’Expo 58 offre une combinaison originale d’humour, de mystère et d’histoire qui donne envie de découvrir les autres romans de la série Van Loo à commencer par Périls en ce Royaume, situé une décennie plus tôt, dans la Belgique de 1947.
J’ai aimé…
- Le style de l’auteur : un humour mordant, des dialogues vivants, mais aussi une façon très personnelle de relater les évènements à travers le point de vue (original) du personnage principal
- Le personnage de Michel Van Loo, anti-héros à la moralité douteuse pourtant terriblement attachant
- Les nombreuses références à des lieux emblématiques de Bruxelles dans les années 1950
- Le fait qu’il soit possible de profiter du roman sans avoir lu les tomes précédents.
J’aurais aimé…
- Un dénouement de l’intrigue policière un peu plus détaillé, même si au final le véritable enjeu du récit est ailleurs
- Des renvois de notes de bas de page en hyperliens dans la version EPUB (fonctionnalité malheureusement non activée) pour mieux comprendre les nombreuses expressions en dialecte bruxellois
- Une annexe avec quelques photos d’archives des principaux pavillons de l’Expo décrits dans le roman.