Gisèle Halimi, une jeunesse tunisienne est une bande dessinée biographique passionnante consacrée aux jeunes années de la célèbre avocate et militante féministe française. Inspiré de son autobiographie Le lait de l’oranger, l’album montre comment les préjugés dont a été victime la petite fille juive berbère dans la société tunisienne mais aussi dans sa propre famille ont façonné sa personnalité d’adulte.
Une petite fille rebelle en quête de reconnaissance parentale
Si la dimension historique du roman graphique Gisèle Halimi, une jeunesse tunisienne est très intéressante, le dimension personnelle ne l’est pas moins. On apprend ainsi que Gisèle a souffert de l’indifférence de sa mère, une juive séfarade aux valeurs plutôt conservatrices, peu sensible aux succès scolaires de sa fille et désireuse de la voir « bien mariée » au plus vite. Rêvant de voir son fils aîné devenir avocat, le père de Gisèle est parfois plus compréhensif même si sa fille le craint autant qu’elle l’admire.
Problèmes d’incontinence, perte d’un frère en bas âge, rivalité garçons-filles au sein de la fratrie… Gisèle a du mal à trouver sa place au sein de cette famille et voit dans l’école un espoir d’émancipation. Face au peu d’enthousiasme de ses parents pour ses ambitions scolaires, son oncle et sa tante communistes vont jouer un rôle clé. Ils encouragent la petite fille à réaliser son rêve : partir étudier le droit à Paris.
Guerre et décolonisation
La période n’est pourtant pas propice : en 1945, la Seconde guerre mondiale vient tout juste de se terminer quand Gisèle est prête à rentrer à l’Université. Elle a déjà fait l’expérience de la révolte arabe contre le pouvoir colonial et de la montée de l’antisémitisme. Le point de vue de sa famille sur les évènements est singulier : d’origine berbère et juive, la famille de Gisèle voit dans le colonisateur français un rempart contre la domination arabe. La France est à la fois une source d’admiration et de rejet. Face à la violence du colonialisme, de l’antisémitisme et du sexisme qui façonnent son enfance, Gisèle tire l’envie et la force de se battre contre les injustice.
Si la BD se termine avec le départ de Gisèle pour Paris, l’annexe résume en quelques pages la suite de ses années de formation et le parcours professionnel qui la mènera à devenir l’une des avocates françaises les plus célèbres du XXe siècle. Gisèle Halimi, une jeunesse tunisienne est ainsi un bel hommage à cette personnalité exceptionnelle décédée en 2020 et qui continue d’inspirer les jeunes générations de militant-e-s pour l’égalité des droits.
Merci aux éditions Delcourt/Mirages de m’avoir permis de lire ce livre avant sa publication officielle le 15 février 2023.
Je découvris cette femme exceptionnelle et exemplaire en parcourons (Actua*bd) je souhaite qu’un jour son portrait soit graver sur un billet 🎟 de vingt dinars tunisiennes. Taoufik moussa.