Détail d’une illustration de la BD « Orwell » (Dargaud, 2019)

BD Orwell : un destin et une œuvre atypiques

La BD Orwell qui vient de sortir chez Dargaud offre une biographie passionnante de l’auteur de 1984 et de La Ferme des animaux. Un homme à la vie personnelle atypique et à l’œuvre visionnaire.

Couverture de la BD « Orwell » (Dargaud, 2019)

De son vrai nom Eric Blair, George Orwell reste dans notre mémoire collective l’un des écrivains majeurs du XXe siècle. Sa postérité est telle qu’aujourd’hui encore, on utilise fréquemment l’adjectif « orwellien » pour décrire un système aux relents totalitaires, ou l’expression « Big Brother » pour évoquer le risque d’une surveillance de masse des individus par l’État.

Né en 1903 dans une famille anglaise de la classe moyenne supérieure, Orwell est admis comme étudiant boursier à la prestigieuse école d’Eton. Toutefois, plutôt que de poursuivre ses études à Oxford, il choisit de devenir policier dans l’armée birmane, la Birmanie étant alors une colonie anglaise. Dégoûté de l’impérialisme après cette expérience, ses idéaux politiques se radicalisent et il passe de l’anarchisme au socialisme révolutionnaire. Cela ne l’empêche pas d’être très critique envers le communisme d’État tel que pratiqué en Union soviétique.

Un intellectuel engagé, attiré par le « petit peuple »

Engagé comme combattant volontaire du côté des Républicains pendant la guerre civile espagnole dans les années 1930, il fait l’amère expérience des dérives du communisme politique lorsque lui et les autres volontaires internationaux de son unité se voient menacés d’arrestation par le pouvoir communiste en place à Barcelone. Un épisode qu’il relate dans un témoignage publié en 1938, Hommage à la Catalogne.

Outre son expérience du combat et de la guerre (il devient ensuite sergent de la Home Guard à Londres pendant la seconde guerre mondiale), la BD Orwell montre comment la pensée politique de l’écrivain s’est formé aux contacts des ouvriers et des laissés-pour-compte. Plongeur dans un hôtel parisien quelque temps, il explore les bas-fonds londoniens et passe même quelques nuits dans les asiles publics où il se frotte à la pauvreté extrême. Un choix pour le moins anticonformiste pour cet homme éduqué dont l’accent chic détonne dans les milieux populaires.

Après son mariage, Orwell se range quelque peu et sa carrière de journaliste et d’écrivain prend de l’ampleur. Il choisit alors de partir vivre à la campagne, au contact de la nature, fuyant la ville et la politique.

Une œuvre multiple et visionnaire

L’un des grandes forces de la BD Orwell est la façon dont elle montre comment le parcours personnel de l’homme a influencé l’œuvre de l’écrivain. Plusieurs extraits des écrits d’Orwell sont ainsi habilement intégrés dans le récit, facilement identifiables par le lecteur grâce à l’utilisation d’une police de caractères différente.

Autre moyen de mettre en avant ces inspirations multiples, Pierre Christin a fait appel à six dessinateurs différents (André Julliard, Olivier Balez, Manu Larcenet, Blutch, Juanjo Guardino, Enki Bilal) pour illustrer certains épisodes et œuvres clés de la vie d’Orwell. Ces apartés s’intègrent remarquablement bien au scénario, offrant un contraste avec le dessin en noir et blanc de Sébastien Verdier. Celui-ci s’est vraisemblablement plongé dans les photos d’époque car il offre à voir un Orwell très ressemblant à l’original.

Son utilisation occasionnelle de la couleur permet par ailleurs de créer des effets intéressants, mettant en avant certaines émotions des personnages tout en soulignant le rapport entre histoire et fiction, entre réel et imaginaire. Une belle réussite pour cet ouvrage qui donne envie de se (re)plonger dans les textes d’Orwell.

Vidéo bonus : Pierre Christin présente la BD Orwell

Article original écrit pour Le Suricate Magazine

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